L’hiver

Aujourd’hui, je sors.
Je sors, mais je ne sais jamais quoi porter en hiver.
J’aime bien l’hiver, mais le problème est que le temps change très vite et que l’on peut avoir dans une même journée un grand beau temps, des pluies intenses et de gros changements de température.
Aujourd’hui, pour le moment, il fait beau. Et chaud.
Je sors, en espérant que cela sera le cas toute la journée. Mais, par expérience, et par prudence, je décide de prendre une veste imperméable et des bottes.
Je sors, pour aller pêcher.
On trouve beaucoup de poissons dans cette mer qui me berce depuis mon enfance. Il faut dire que j’ai de la chance, ma famille est installée ici depuis la nuit des temps. Et nous pêchons de génération en génération. C’est mon grand-père et ma mère qui m’ont enseigné cet art ancestral.
Nous connaissons bien les fonds marins proches de chez nous, riches en marlins, en perroquets, en mérous, en poissons-lions… Et nous en profitons bien. Ils sont d’ailleurs pratiquement tous aussi bons que beaux.
Ici, la vie est simple.
Simple, car bercée par le rythme des marées, par les saisons qui nous rappellent que la nature est reine.
Simple, car nous ne sommes pas pollués par les excès de la civilisation.
J’aime cette vie, au bord de l’eau, proche de la nature, qui me permet de nourrir ma famille, de vivre tout simplement.
Enfin, de mieux vivre que les habitants des grandes villes, situées à plusieurs centaines de kilomètres, là où vivre ressemble beaucoup à de la survie, d’après ce que l’on dit. Mais j’avoue que je n’ai que très peu de contacts avec les gens des villes. Je n’y suis d’ailleurs jamais allé. Je ne vois pas bien ce que je pourrais y faire.
J’aime cette vie simple, mais j’ai un rêve.
Un rêve que j’ai depuis mon enfance, basé sur les récits de mon grand-père.
J’aimerais voir et toucher la neige, jouer avec.
La neige, je l’ai quand même vue, mais sur des photos.
C’est bien une photo, mais cela ne remplace pas le concret.
Il paraît que du temps de mon grand-père, il y avait de temps en temps de la neige au village, pendant l’hiver.
Il paraît même que du temps du grand-père de mon grand-père, il y en avait beaucoup. Les habitants du village devaient même s’habiller chaudement et s’organiser pour se déplacer ou pêcher, tellement il y en avait.
Mais je crois bien que je n’en verrai jamais, de la neige, que ce soit ici, à Qaanaaq, ou n’importe où ailleurs au Groenland.

Amans Mernac

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